Dans son rapport de novembre 2023, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a préconisé la création d’une mesure judiciaire d’urgence permettant au juge aux affaires familiales de statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas d’inceste vraisemblable. « Sur le modèle de l’ordonnance de protection des femmes victimes de violences conjugales, cette ordonnance de sûreté de l’enfant » assurerait « que le principe fondamental de protection prioritaire de l’enfant soit respecté tout en garantissant un débat judiciaire par le critère de la vraisemblance des violences sexuelles incestueuses« .
La loi n° 2024-233 du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales a été publiée au Journal officiel du 19 mars 2024.
Cette loi s’inscrit dans la continuité de plusieurs textes récents visant à lutter contre les violences intrafamiliales et à protéger les enfants. Elle marque une progression significative dans la protection des enfants exposés à ces violences. En effet, la loi reconnaît les enfants en tant que « co-victimes »: En utilisant d’emblée ce terme dans son intitulé, la loi reconnaît explicitement que les enfants peuvent être indirectement victimes des violences intrafamiliales, même lorsqu’ils ne sont pas directement visés.
Concrètement, le texte pose tout d’abord le principe d’une suspension automatique de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi ou mis en examen dans les cas suivants :
- pour un crime commis sur la personne de l’autre parent ;
- pour une agression sexuelle incestueuse sur son enfant ;
- pour un crime commis sur son enfant.
Cette suspension s’applique jusqu’à la décision du juge aux affaires familiales, jusqu’à un non-lieu, ou jusqu’à la décision de la juridiction pénale.
Enfin, la loi permet aux services sociaux départementaux de demander au tribunal de leur déléguer totalement ou partiellement l’autorité parentale dans les situations suivantes :
- désintérêt manifeste des parents,
- incapacité de ces-derniers à exercer l’autorité parentale,
- si l’un des parents est poursuivi, mis en examen ou condamné, même non définitivement pour un crime ayant entraîné la mort de l’autre parent, ou pour un crime ou une agression sexuelle incestueuse contre l’enfant.