Catégorie : Droit & législation

Comment se passe le dépôt de plainte d’une victime de violences sexuelles et sexistes ?

Contre les violences faites aux femmes, Droit & législation

La Police nationale a élaboré un document de présentation détaillant les étapes du dépôt de plainte, en précisant les lieux et modalités possibles.

La plainte peut également être déposée en ligne, via une plateforme numérique d’accompagnement des victimes de violences sexuelles, sexistes ou conjugales. Ce service, accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, inclut un tchat d’assistance pour guider les victimes dans leurs démarches.

La CEDH met fin au « devoir conjugal » : consentement et liberté sexuelle au cœur du mariage

Droit & législation

Strasbourg, 23 janvier 2025 – rendu définitif le 23 avril 2025

Dans l’affaire H.W. c. France (requête n° 13805/21), la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir prononcé un divorce aux torts exclusifs d’une femme de 69 ans, au motif qu’elle avait cessé d’avoir des relations sexuelles avec son époux. Cette décision remet en cause l’appellation traditionnelle de « devoir conjugal » dans le droit français, historiquement invoquée pour fonder la faute en divorce.

Les faits

Mariée en 1984, la requérante a interrompu ses relations sexuelles avec son mari à partir de 2002, pour des raisons de santé et en raison de violences conjugales.
Après avoir sollicité un divorce, la cour d’appel de Versailles (2019) l’a déclarée «fautive», se fondant sur son manquement durable au devoir conjugal, conformément aux articles 215 et 242 du Code civil français.
Elle a épuisé les recours nationaux, jusqu’à la Cour de cassation qui, en septembre 2020, a rejeté son pourvoi.

La décision de la CEDH

La Cour a jugé que :

Tout acte sexuel non consenti constitue une forme de violence sexuelle.
Quel que soit le devoir implicite attaché au mariage, le consentement ne peut pas être présumé.

En ne tenant pas compte de ce consentement, la législation française et la jurisprudence ont porté atteinte à :

  • la liberté sexuelle,
  • le droit de disposer de son propre corps,
  • le droit au respect de la vie privée, protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Conclusion : la CEDH a conclu à la violation de l’article 8, considérant que l’ingérence dans la vie privée n’était ni proportionnée, ni nécessaire dans une société démocratique.

Enjeux et portée

L’arrêt représente une rupture majeure : le mariage n’implique jamais une obligation permanente de relations sexuelles et interdit toute reconnaissance juridique d’un « devoir conjugal ».
Bien que relatif à la France, l’arrêt s’applique aux 45 États parties à la Convention, appelant les juges nationaux à renoncer à fonder un divorce pour faute sur le refus d’intimité conjugale.
En France, dès la fin de la période de trois mois sans pourvoi devant la Grande Chambre, les tribunaux ne pourront plus fonder un divorce sur un manquement au devoir conjugal sans réformes législatives.

Réactions

Les associations féministes saluent l’arrêt comme « un tournant pour les droits des femmes et la liberté sexuelle ».

Conclusion

Avec l’arrêt H.W. c. France du 23 janvier 2025, la CEDH impose au mariage une obligation incontournable : le consentement. Toute relation sexuelle imposée devient inacceptable, moralement et juridiquement, même au sein du mariage. Cet arrêt marque une étape décisive pour la reconnaissance des droits sexuels et corporels individuels et encourage la réécriture des pratiques judiciaires nationales pour mieux protéger la liberté sexuelle et l’intégrité personnelle.

Chiffres-clés : les plaintes pour violences au sein du couple

Droit & législation, L'actu de l'observatoire pour l'égalité femmes-hommes

Malgré des réticences persistantes à porter plainte (seulement 1 victime sur 6 selon la MIPROF), les dépôts de plainte sont en hausse.

Les services de police et de gendarmerie recensent un nombre croissant de victimes :

  • 2022 : 244 000 victimes déclarées, soit une augmentation de 15 % par rapport à 2021.
  • 2023 : 270 711 victimes recensées, soit une hausse de près de 14 %.

La MIPROF souligne par ailleurs que les victimes enregistrées de violences sexuelles au sein du couple ont quadruplé depuis 2016. Enfin, 70 % des victimes déclarent avoir subi plusieurs faits de violence.

Source : victimes de violences au sein du couple enregistrées par les services de police et de gendarmerie – MIPROF.

70% déclarent avoir subi plusieurs faits de violence

Dans le Gard, les policiers et gendarmes bénéficient de formations pour améliorer la prise de plainte dans les commissariats et gendarmerie et mettent tout en œuvre pour venir en aide aux personnes victimes de violences au sein du couple.

La présence de 5 intervenantes sociales en commissariat et gendarmerie sur l’ensemble du territoire gardois est un soutien précieux pour les victimes de violences au sein du couple.

En outre, dans les commissariats de Police, le « Tableau d’Accueil Confidentialité » a pour finalité d’améliorer la prise en charge des victimes, notamment celles de violences conjugales ou d’agressions sexuelles.

Ce dispositif vise à renforcer la protection des personnes vulnérables et la confidentialité de leur accueil.

Ainsi, les victimes peuvent signaler discrètement leur besoin spécifique, ce qui permet une prise en charge plus rapide et confidentielle, et autant que possible à l’écart du public.

Vers la reconnaissance de l’enfant covictime de violences conjugales

Droit & législation, Enfance

Avec le renforcement de l’effectivité des droits des personnes victimes – et de leur famille de violences conjugales, ce décret amorce la reconnaissance du mineur covictime de violences conjugales.

Le Décret n° 2021-1516 du 23 novembre 2021 crée un nouvel article D. 1-11-1 au sein du code de procédure pénale qui prévoit qu’en cas de violences conjugales commises en présence d’un mineur, la circonstance aggravante est requise.

Entrée en vigueur le 1er février 2022, la circonstance aggravante peut être relevée par le procureur de la République ou la juridiction de jugement. Enfin, le mineur doit pouvoir se constituer partie civile, le cas échéant en étant représenté par un administrateur ad hoc.

La constitution comme partie civile en amont du jugement permet de positionner le mineur comme victime et non plus témoin.  Ces dispositions s’appliquent également à l’information judiciaire.

Afin de prendre en compte les intérêts de l’enfant covictime, le procureur veille à ce que tous les éléments nécessaires figurent au dossier de la procédure soumise à la juridiction de jugement. Cela permet à cette dernière d’évaluer l’ampleur du préjudice subi par le mineur et de statuer, conformément aux dispositions du code pénal et du code civil, sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale, la suspension des droits de visite et d’hébergement, ou encore sur l’exercice de cette autorité. Le cas échéant, le procureur peut verser au dossier des pièces issues d’autres procédures devant le tribunal judiciaire, le juge aux affaires familiales ou le juge des enfants, ou encore requérir un examen ou une expertise psychologique du mineur.

Enfin, il est souligné que cette nouvelle loi s’inscrit dans la lignée de la Convention internationale des droits de l’enfant, qui reconnaît comme un droit fondamental l’accès de chaque enfant à son juge. Désormais, ces nouvelles dispositions permettent au juge pénal, tout comme le juge des enfants et le juge aux affaires familiales, de prendre des décisions éclairées en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant covictime de violences conjugales.

Pour en savoir plus lisez l’analyse de Marine Chollet dans Dalloz actualité, le quotidien du droit :

AGAVIP : Soutien global aux victimes et innovation dans l’accompagnement socio-judiciaire

Droit & législation

Basée à Nîmes, l’Association gardoise d’aide aux victimes, de médiations et de mesures socio-judiciaires (AGAVIP-Médiations) a pour mission principale d’accueillir, d’informer et d’accompagner toutes les victimes d’infractions pénales, d’accidents de la route, d’accidents collectifs et de catastrophes naturelles en leur offrant une écoute attentive et en les orientant vers les professionnels appropriés dans le domaine du droit.

Créée en 1983, reconnue d’intérêt général et agréée par le ministère de la Justice, l’association est aujourd’hui dirigée par un bureau composé de professionnels expérimentés, tels que Michel DESPLAN, président et avocat général honoraire près de la Cour de cassation, et Michel BELIN, vice-président et magistrat honoraire. L’association, composée de 20 salariés et 17 bénévoles, offre une gamme de services variés, avec un focus sur l’aide aux victimes, incluant un accompagnement juridique, psychologique et social. Elle dispose de deux intervenants sociaux en gendarmerie. L’AGAVIP reçoit les victimes dans les bureaux d’aide aux victimes des Tribunaux judiciaires de Nîmes et Alès, ainsi que dans des permanences délocalisées, accessibles via les points d’accès aux droits du département et les maisons de justice et de droit. Une nouvelle permanence est également mise en place à la maison des femmes du CHU Carrémeau.

Depuis la loi de novembre 2023, les administrateurs ad ’hoc sont particulièrement mobilisés dans les affaires de violences conjugales.  L’administration ad hoc permet de représenter les intérêts d’un mineur en justice sur réquisition d’une juridiction.  L’AGAVIP poursuit son action socio-judiciaire liée au parcours judiciaire des victimes à travers la mise en place de la justice restaurative, d’enquêtes de personnalité et enquêtes sociales rapides.

L’association veille à la protection des victimes à travers trois dispositifs : le déploiement du bracelet antirapprochement, qui surveille les déplacements de l’auteur présumé pour protéger les victimes de violences conjugales, l’« Évaluation personnalisée des victimes » (EVVI), et le contrôle judiciaire socio-éducatif pour garantir le respect des mesures imposées par le juge, telles que les interdictions de contact. Elle est également territoire pilote pour “Mémo de Vie”, une plateforme sécurisée permettant aux victimes de violences de sauvegarder des documents utiles pour leurs démarches.

Soutien psychologique aux enfants covictimes de violences conjugales : un dispositif innovant de l’AGAVIP

L’AGAVIP, présente pour toutes les victimes et en veille de terrain, a expérimenté en 2024 une action de soutien psychologique pour les enfants covictimes de violences conjugales. Face à un manque de soutien accessible, l’association propose un espace thérapeutique où les enfants peuvent apprendre des compétences de régulation émotionnelle à travers des jeux, dessins et créations. L’objectif est de restaurer la confiance en soi et de dénouer le traumatisme des violences vécues. 54 enfants ont bénéficié de séances gratuites, jusqu’à 10,  avec des résultats positifs : amélioration du sommeil, réduction de l’anxiété, et meilleure gestion émotionnelle.

Anonymisation des adresses : Dites-le-nous !

Droit & législation

La Direction générale des finances publiques (DGFIP) renforce son soutien aux victimes de violences. Grâce à la campagne « Dites-le-nous », l’ensemble des services de la DGFIP offre désormais la possibilité de rendre confidentielle la nouvelle adresse des victimes, notamment après une séparation.

Les services fiscaux s’entendent à travers la déclaration de ressources, mais aussi la cantine, le recouvrement….

Cette initiative, bien que pouvant sembler secondaire dans l’urgence, est essentielle pour structurer la sécurité des personnes concernées. En protégeant ces données sensibles, la DGFIP contribue à créer un environnement plus sûr, permettant aux victimes de se reconstruire sereinement.

La DGFIP fait de ce combat pour la sécurité une de ses priorités, démontrant son engagement à soutenir les victimes de manière concrète et durable.

Ensemble, faisons un pas de plus vers la sécurité et le soutien des victimes.
Pour toute information ou demande, contactez le numéro dédié : 0 809 401 401 ou rendez-vous dans les Services des impôts des particuliers (SIP) du département.

Ordonnance de protection immédiate : une mesure clé à la disposition des magistrats

Contre les violences faites aux femmes, Droit & législation

L’Ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI) est une mesure délivrée par le Juge aux affaires familiales (JAF) sous 24 heures, sans audience préalable, lorsqu’il existe des violences et un danger grave et immédiat vraisemblables. Cette décision est prise sans débat contradictoire.

La loi du 13 juin 2024 a réformé la procédure d’ordonnance de protection pour mieux protéger les victimes de violences conjugales et de mariage forcé. Parmi les principales évolutions :

  • Prolongation de la durée des mesures : l’ordonnance de protection est désormais valable 12 mois au lieu de 6 (article 1er de la loi n° 2024-536).
  • Renforcement des sanctions : le non-respect des obligations/interdictions imposées par une ordonnance entraîne désormais 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende (contre 2 ans et 15 000 € auparavant).

Un décret et une circulaire des 15 et 16 janvier 2025 ont précisé le cadre d’application des OPPI dans les situations de violences intrafamiliales.

La réforme introduit la possibilité pour le procureur de la République, avec l’accord de la victime, de demander une Ordonnance provisoire de protection immédiate dans le cadre d’une requête principale. Sous 24 heures, le JAF peut alors imposer des mesures d’urgence comme :

  • L’interdiction de rencontrer certaines personnes.
  • L’interdiction d’accès à certains lieux.
  • L’interdiction de détenir une arme (avec remise aux forces de sécurité).
  • La suspension du droit d’hébergement et la fixation d’un simple droit de visite en espace de rencontre (si interdiction de contact sauf exception motivée).
  • La dissimulation de l’adresse de la victime.