Auteur/autrice : Fanny

Le contrôle coercitif dans les violences conjugales

Contre les violences faites aux femmes

Qu’est ce que c’est ?

  • Le contrôle coercitif est une forme insidieuse et continue de violence, souvent dans un contexte conjugal et principalement constitué de micro-agressions répétées au quotidien. Il peut inclure des incidents de violence et des stratégies de contrôle moins visibles, notamment du gaslighting (décervelage ou méthode de manipulation et d’abus de pouvoir ),
  • Des menaces, de l’isolement et des restrictions arbitraires. C’est le professeur Evan Stark qui, en 2007, conceptualise le contrôle coercitif dans son ouvrage Coercive Control: How Men Entrap Women in Personal Life. Il y explique que les hommes ont recours au contrôle coercitif comme outil de subordination des femmes. Stark estime que les hommes se sont adaptés à l’avancée des droits des femmes en adoptant des « stratégies de contrôle et de domination moins ouvertement visibles, plus subtiles, mais tout aussi dévastatrices ». Stark compare le contrôle coercitif à une cage dans laquelle la victime se sent prise au piège.
  • Schéma de contrôle de l’auteur sur la victime qui va devenir assujettie à ce dernier : par exemple, un mari qui trouve que sa femme est habillée trop court ou trop sexy et qui décide de ses tenues ; une femme qui doit dire où elle est et ce qu’elle fait quand elle est en pause ou qui n’a pas accès à son compte en banque. Autant de définitions du « contrôle coercitif», une contrainte imposée par un conjoint dans la vie de tous les jours. Les enquêteurs le retrouvent dans 100 % des féminicides
  • C’est un schéma et non une infraction pénale car elle n’est pas encore inscrite dans la loi.
  • Faire entrer cette notion dans le Code pénal permettrait d’en faire un délit pour déceler et punir les hommes violents avant qu’ils ne passent aux coups.
  • La France incrimine les violences psychologiques et a été un des premiers pays à le faire mais la victime doit prouver un mécanisme d’emprise. Or, l’infraction de contrôle coercitif permettrait d’inverser la charge de la preuve. Permet une meilleure identification des violences intrafamiliales et facilite la poursuite des auteurs.

« Au lieu de se demander pourquoi la victime n’est pas partie, on se demande comment est-ce que l’agresseur s’y est pris pour qu’elle reste. La victime ne doit plus prouver l’emprise, désormais on braque le projecteur sur celui qui impose et cela change tout », souligne Andreea Gruev-Vintila, chercheuse en psychologie sociale à l’université Paris-Nanterre. A l’origine, elle travaillait sur le terrorisme, des caractéristiques qu’elle retrouve dans les violences intrafamiliales, qui doivent être considérées selon elle comme des violences sociales.

La notion de contrôle coercitif dans les violences conjugales est donc au cœur des débats. En 2023, l’ancienne ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes songeait à introduire cette notion dans le Code pénal. Un groupe de travail avait été désigné.

Cette notion est consacrée en Angleterre, au Pays de Galles, en Irlande, en Ecosse, en Australie ou encore en Belgique (depuis la loi du 13 juillet 2023). Ainsi que dans certains états des Etats-Unis.

La Jurisprudence :

Cinq arrêts rendus par la Cour d’appel de Poitiers le 31 janvier 2024 viennent consacrer la notion de contrôle coercitif comme schéma des violences conjugales.

Le 31 janvier 2024, par la grâce de la cour d’appel de Poitiers et en particulier de l’engagement de sa première présidente, Gwenola Joly-Coz, et de son procureur général, Éric Corbaux, le contrôle coercitif – concept propulsé par le sociologue Evan Stark – est devenu une notion juridique française. Inscrit au cœur de cinq arrêts rendus ce jour-là, le contrôle coercitif quittait le champ de l’enseignement, de la recherche, et des rapports parlementaires, où il était cantonné depuis 2017, pour rejoindre celui du droit positif.

Dans les cinq arrêts, la Cour d’appel prend soin d’identifier ce qu’elle appelle « les outils de contrôle coercitif », lesquels permettent de dégager une définition de la notion qui fait écho à celle proposée en doctrine. La Cour relève ainsi que « les agissements (de l’auteur) sont divers et cumulés » et que, « pris isolément, ils peuvent être relativisés. Identifiés, listés et mis en cohérence, ils forment un ensemble ».  C’est précisément là l’intérêt du contrôle coercitif que de réunir, sous une même notion, un ensemble d’actes tendus vers le même objectif de contrôle et d’assujettissement de la victime et qui, sans cette notion commune, seraient traités de manière isolée, voire seraient ignorés. Dès lors qu’est identifié un schéma de contrôle coercitif, les violences conjugales révèlent, selon la Cour d’appel, « la relation d’obéissance et soumission » de la victime à l’auteur, lequel « s’érige en maître » du domicile, de la maison et/ou du fonctionnement familial.

 Pour consacrer la notion, la Cour d’appel rapproche le contrôle coercitif à des infractions pénales (respect de la légalité pénale). En effet, les arrêts ont permis une place particulière à la notion qui est celle d’un instrument à mi-chemin entre, d’un côté, un concept de sciences sociales, facilitant l’identification des situations problématiques dans le champ des violences conjugales et sur lequel la Cour nous donne véritablement une leçon de science et, de l’autre, une notion juridique distillée tout au long de l’arrêt et qui influe sur l’application des textes en vigueur.

 Ces arrêts s’inscrivent dans une volonté judiciaire de lutter contre les violences  conjugales, récemment consacrée par l’institution des pôles spécialisés  au sein des tribunaux judiciaires  et des cours d’appel.

Sources

Lutte contre les violences faites aux femmes : une première législation européenne

Contre les violences faites aux femmes

Une législation sur les violences à l’égard des femmes et les violences domestiques vient d’être approuvée par le Conseil de l’Union européenne (UE). Si le texte n’aborde pas nommément la question du viol, il caractérise comme circonstances aggravantes ce type de violence et aborde la question de la prévention et de la protection.

Le texte de la directive a été approuvé par le Parlement européen le 24 avril 2024, le texte a été également adopté par le Conseil de l’UE le 7 mai 2024.

Ces nouvelles règles entreront en vigueur 20 jours après leur publication au Journal officiel de l’Union européenne, les États de l’UE ayant ensuite trois ans pour mettre en œuvre les dispositions du texte.

Ce texte veut à la fois mieux caractériser les actes passibles de sanction et renforcer les garanties pour les victimes. Il met en avant certaines violences exercées à l’encontre des femmes comme :

  • Les mutilations génitales féminines ;
  • les mariages forcés ;
  • l’usage des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans un but de manipulation, d’intimidation ou de contrainte : partage non consenti d’images intimes (cyber flashing), traque furtive en ligne (cyber stalking), cyberharcèlement et incitation à la violence ou à la haine en ligne (pratiques plus souvent exercées à l’encontre de femmes ou de jeunes filles).

Des règles minimales de sanctions

Le texte établit des règles minimales de sanctions d’actes de violences sexuelles ou de violences domestiques pour l’ensemble des pays membres de l’UE.

Ces règles concernent :

  • la définition des infractions pénales et des sanctions dans les domaines de l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants et de la criminalité informatique ;
  • les droits des victimes durant une période appropriée avant, pendant et après la procédure pénale ;
  • la protection et le soutien aux victimes, la prévention et l’intervention précoce.

La directive enjoint les pays membres à intervenir auprès des fournisseurs d’accès internet pour mettre un terme aux contenus susceptibles de participer à une violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe.

Pour toute une série de violences caractérisées à l’égard des femmes, les circonstances pourront être considérées comme aggravantes (violences domestiques répétées, violences sur personne vulnérable, violences à l’encontre d’un enfant ou en présence d’un enfant, violences à plusieurs).

Prévention et protection des personnes :

Au-delà des sanctions pénales, la directive aborde la question des moyens mis en place par les pays membres pour assurer la prévention et la protection des victimes. Ces moyens concernent notamment :

  • la mise en place de canaux de signalisation des actes de violence ou de violences domestiques et la possibilité de porter plainte en ligne (au besoin par l’apport de preuves sans préjudice des règles de procédure nationale) ;
  • l’aide juridictionnelle auprès des victimes ;
  • l’incitation par les autorités compétentes, à encourager la parole de personnes témoins de violences ou même celle de professionnels soumis à des obligations de confidentialité en cas de risque imminent ;
  • l’évaluation des besoins individuels de la victime en matière de soutien et de protection

« Il s’agit d’un moment sans précédent dans le cadre du renforcement des droits des femmes. Il ne pourra y avoir d’égalité réelle que lorsque les femmes pourront vivre sans craindre d’être harcelées, violemment attaquées ou physiquement blessées. Cette loi constitue une étape importante pour y parvenir. »
Marie-Colline Leroy, secrétaire d’État belge à l’égalité des genres

 

Le contrôle coercitif au cœur de la violence conjugale

Culture

Andreea Gruev-Vintila, Maîtresse de conférences HDR en psychologie sociale à l’Université Paris Nanterre, docteure en psychologie, elle mène des recherches interdisciplinaires sur les processus psychosociaux, l’impact et la pénalisation des violences et du contrôle coercitif dans les sociétés contemporaines.

Ses recherches ont conduit à l’introduction de formations sur le contrôle coercitif à l’École nationale de la Magistrature et à envisager l’incrimination du contrôle coercitif en France. Elle a coordonné le réseau ANR-XTREAMIS et a contribué au groupe de travail « Violences Intrafamiliales » du Grenelle Violences Conjugales en 2019, à une proposition de loi pour mieux assurer la sécurité des enfants co-victimes de violences conjugales en 2021 et au groupe de travail « Contrôle coercitif’ de la Force juridique de la Fondation des Femmes en 2022.

« Le contrôle coercitif englobe ainsi les cas de violences physiques, psychologiques, économiques et de violences administratives, le point commun qui structure le délit étant l’atteinte aux droits fondamentaux de la personne. C’est un angle d’approche (droits fondamentaux) qui se distingue du biais classique – et trop étroit – de l’atteinte physique. »
Yvonne Muller-Lagarde est professeure de droit pénal et membre du Centre de droit pénal et de criminologie de l’Université Paris-Nanterre.
Elle publie et intervient dans des colloques notamment sur le sujet des violences faites aux femmes.

Présentation du livre

Ce premier livre français sur le contrôle coercitif présente le concept qui pourrait révolutionner la vision de la violence conjugale et sa traduction juridique en France. Le contrôle coercitif, concept central d’une approche globale de la violence conjugale et intrafamiliale comme atteinte aux droits humains, désigne un répertoire de comportements oppressifs basés sur le privilège donné par le sexe. Il révèle la violence conjugale comme forme de la violence sociale, loin de sa représentation courante comme forme houleuse de conflit conjugal/parental. Comment les agresseurs familiaux attaquent-ils, avant et après la séparation, les droits, la liberté, la santé des victimes ? Pourquoi les effets du contrôle coercitif sont-ils durablement dévastateurs ? Comment appréhender ce précurseur majeur de la quasi-totalité des féminicides qui est aussi le contexte prévalent des violences envers les enfants ?

Ce livre a un triple objectif  :

  1. fournir les connaissances académiquement rigoureuses et socialement pertinentes pour décrypter ces comportements avant que les agresseurs n’utilisent la coercition et la violence pour contrôler les victimes  ;
  2. permettre la création d’une culture commune favorable au dialogue interdisciplinaire, interprofessionnel et sociétal pour mieux assurer la sécurité des personnes victimes et réduire l’impunité des agresseurs  ;
  3. expliquer aux professionnels  les éléments-clés de cette approche fondée par des données probantes issues de la recherche scientifique face aux difficultés de la justice pénale, civile et de la protection de l’enfance.

«Ce livre répond au besoin des magistrates et des magistrats d’adosser leur pratique à des concepts.»
Gwenola Joly-Coz, Première Présidente de la Cour d’Appel de Poitiers

Le contrôle coercitif au cœur de la violence conjugale – Présentation des éditions Dunod par Andreea Gruev-Vintila Maître de conférences HDR à l’Université Paris-Nanterre

Une nouvelle loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales

Contre les violences faites aux femmes

Dans son rapport de novembre 2023, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a préconisé la création d’une mesure judiciaire d’urgence permettant au juge aux affaires familiales de statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas d’inceste vraisemblable. « Sur le modèle de l’ordonnance de protection des femmes victimes de violences conjugales, cette ordonnance de sûreté de l’enfant » assurerait « que le principe fondamental de protection prioritaire de l’enfant soit respecté tout en garantissant un débat judiciaire par le critère de la vraisemblance des violences sexuelles incestueuses« .

Cette loi s’inscrit dans la continuité de plusieurs textes récents visant à lutter contre les violences intrafamiliales et à protéger les enfants. Elle marque une progression significative dans la protection des enfants exposés à ces violences. En effet, la loi reconnaît les enfants en tant que « co-victimes »: En utilisant d’emblée ce terme dans son intitulé, la loi reconnaît explicitement que les enfants peuvent être indirectement victimes des violences intrafamiliales, même lorsqu’ils ne sont pas directement visés.

Concrètement, le texte pose tout d’abord le principe d’une suspension automatique de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi ou mis en examen dans les cas suivants :

  • pour un crime commis sur la personne de l’autre parent ;
  • pour une agression sexuelle incestueuse sur son enfant ;
  • pour un crime commis sur son enfant.

Cette suspension s’applique jusqu’à la décision du juge aux affaires familiales, jusqu’à un non-lieu, ou jusqu’à la décision de la juridiction pénale.

Enfin, la loi permet aux services sociaux départementaux de demander au tribunal de leur déléguer totalement ou partiellement l’autorité parentale dans les situations suivantes :

  • désintérêt manifeste des parents,
  • incapacité de ces-derniers à exercer l’autorité parentale,
  • si l’un des parents est poursuivi, mis en examen ou condamné, même non définitivement pour un crime ayant entraîné la mort de l’autre parent, ou pour un crime ou une agression sexuelle incestueuse contre l’enfant.

LOI n° 2024-233 du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales (1)

En zones rurales, les violences conjugales semblent absentes mais sont réelles

L'actu de l'observatoire pour l'égalité femmes-hommes

Alors qu’en France, les zones rurales représentent 80 % de la superficie totale du pays et sont occupées par environ un tiers de la population française totale, elles concentrent près de la moitié des féminicides constatés chaque année.

Dès 2021, le Sénat s’empare de cette question au travers du Rapport d’information n° 60 FEMMES ET RURALITÉS : EN FINIR AVEC LES ZONES BLANCHES DE L’ÉGALITÉ  (2021-2022), tome I, déposé le 14 octobre 2021.

Le rapport d’information note que les femmes en ruralité, sont en quelque sorte « doublement » victimes : de violences physiques et psychologiques, économiques, etc. comme toutes les autres femmes exposées à cette situation, mais également victimes de difficultés supplémentaires du point de vue de leur prise en charge, du traitement des violences et de leur parcours de sortie des violences, difficultés liées au fait même de vivre en milieu rural.

La Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF) relève des obstacles à l’identification des femmes victimes de violences domestiques en milieu rural et mène une campagne pour se rendre au plus près des territoires ruraux notamment avec des permanences juridiques. Dans le Gard, plus de 20 permanences se déploient à travers le département.

Isolement géographique et moral

Le centre Hubertine-Auclert en région Ile-de-France a publié, en 2019, un rapport intitulé « Femmes et ruralité pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans les territoires ruraux franciliens ». Il a noté que « dans le milieu rural, il existe un grand vide concernant la lutte contre les violences. Les femmes en milieu rural ne connaissaient pas toujours le numéro d’appel d’urgence 3919 . Ce constat est aussi fait par la Fédération nationale Solidarité Femmes qui déploie et gère le numéro national : seul ¼ des appels proviennent des zones rurales.

Dans la continuité de l’ensemble de ces réflexions, l’Observatoire des Violences Sexistes et Sexuelles de Nouvelle-Aquitaine a mis en œuvre une recherche action : « Les femmes victimes de violences en milieu rural de la Nouvelle Aquitaine ». Les travaux de recherche dirigés par Johanna Dagorn se sont appuyés sur des entretiens, des groupes de discussion et des questionnaires dont la passation a été réalisée sur l’ensemble des 13 départements de la région Nouvelle Aquitaine : Femmes violences rural der (nouvelle-aquitaine.fr)

Les résultats mettent en exergue que l’isolement de ces femmes n’est pas que géographique, il est aussi moral. Ils montrent également que les stéréotypes de sexe fortement ancrés et le contrôle social sont des facteurs aggravants pour les femmes victimes de violences en milieu rural.

Plus spécifiquement, le rapport relève :

  • une méconnaissance des droits, du numéro d’écoute national 3919, des lieux ressources spécialisés pour accompagner la sortie de la violence
  • une difficulté à déposer plainte
  • des disparités territoriales dans l’accès aux aides : il manque des services de proximité dans les secteurs de la santé, de la justice, etc.
  • un manque d’associations spécialisées : les lieux d’accueil et d’hébergement sont moins accessibles et moins nombreux
  • une formation insuffisante ou inégale des professionnels et des professionnelles
  • une prégnance des stéréotypes sexistes et d’une société patriarcale
  • des violences niées, difficilement révélées, minimisées ou banalisées
  • un isolement géographique et des difficultés de mobilité
  • une précarité financière.

In fine, ce sont autant de facteurs de vulnérabilité facilitant la mise en place d’un contrôle coercitif.

Femmes de justice

Culture

Qui est Gwenola Joly-Coz ?

Première présidente de la Cour d’appel de Poitiers et spécialiste des politiques publiques liées à l’Egalité entre les femmes et les hommes, elle pourrait être décrite comme engagée sur la question des violences intrafamiliales. Elle a notamment rendu, le 31 janvier 2024, cinq arrêts symboliquement forts, consacrant la notion de contrôle coercitif. (mettre en lien vers l’article consacré au sujet). Elle est également membre fondatrice de l’association « Femmes de justice ».

Indésirables ! Comment les femmes ont réussi à entrer dans la magistrature ? Invisibles ! Pourquoi les femmes juges restent inconnues ?

Mot de l’éditeur

Retrouver les pionnières

Le travail de Gwenola Joly-Coz pour retrouver les juges pionnières et en dresser les portraits est une démarche historique inédite. Les ignorer, c’est nier la révolution engendrée par la loi de 1946, permettant à « l’un et l’autre sexe » de rendre la justice. Les rendre visibles, c’est rappeler la chronologie et découvrir les visages de celles qui ont changé la justice : Présidente de tribunal, Procureure générale, Garde des sceaux, Première présidente de la Cour de cassation…

Expliquer les concepts

Elle a voulu accompagner chaque récit individuel d’une fiche expliquant un concept utile à la conversation mondiale sur l’Egalité entre les femmes et les hommes : la mixité, la parité, l’usage féminin du langage… Gwenola Joly-Coz s’interroge même sur la façon de juger d’une femme ou sur la perception par les hommes d’une justice féminisée. Elle propose une synthèse des réflexions féministes, adaptées au monde judiciaire.

Chez Enrick b édition – 180 pages – Autrice : Gwenola Joly-Coz

À découvrir

Culture

L’exposition de la photographe Juliette Dupuis Carle “Une sur trois”, en référence au fait qu’une femme sur trois sera victime dans sa vie de violences sexuelles.

À travers son objectif, la photographe Juliette Dupuis Carle veut donner la parole aux corps et aux âmes, de femmes victimes de violences sexuelles. Grâce à l’art, elle souhaite exprimer leurs maux et leurs peurs. Montrer avec l’art et la douceur, les douleurs quotidiennes, cachées et trop souvent mises sous silence alors qu’elles sont vécues par, au moins, une personne sur six.

 

Formation améliorée pour les magistrats

Contre les violences faites aux femmes

L’Ecole nationale de la magistrature (ENM) est l’unique formateur des magistrats, juges et Procureurs de la République en France. Elle propose de la formation initiale mais aussi continue pour les magistrats déjà en poste autour de sujets liés à l’exercice de leurs fonctions, ainsi que dans l’appréhension de nouveaux phénomènes et leurs traitements judiciaires.

Les situations de violences intrafamiliales sont prégnantes dans le travail quotidien des juges et des procureurs. Elles demandent un traitement spécifique. Le rapport d’Émilie Chandler, Députée et de Dominique Vérien, Sénatrice, intitulé “Améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales” porte de nombreuses recommandations dont le garde des Sceaux, ministre de la Justice, a pu se saisir, à l’instar de la création de pôles spécialisés au sein de toutes les juridictions.

L’école nationale de la magistrature s’empare du sujet et étoffe son offre de formation

Jusqu’à maintenant, les violences au sein du couple et les violences sexuelles étaient traitées au travers de sessions de formation dédiées de 3 à 4 jours. Désormais, l’ENM construit un socle commun et approfondi de connaissances pour mieux appréhender les enjeux de la lutte structurelle contre les violences intrafamiliales. D’une durée moyenne de huit jours, répartis sur deux ans, le cycle de formation approfondi sur les violences intrafamiliales est développé dans la lignée d’autres thématiques judiciaires comme celle de la justice de la famille ou la lutte anti-terroriste.

Avec l’objectif du renforcement des connaissances sur les spécificités des violences intrafamiliales, leurs impacts sur les victimes, le profil des auteurs et le traitement judiciaire adapté, cette nouvelle formation sera enrichie également d’une phase immersive au sein d’un Centre d’informations sur les Droits des femmes et des familles (CIDFF).

Nathalie Roret, directrice de l’ENM indique qu’ « il est indispensable que l’ENM soit un lieu où l’on parle des violences au sens large, où l’on se forme à ces questions, où l’on réfléchit à ces sujets prioritaires et sociétaux. Je veux ici parler des violences sexuelles et sexistes (VSS), lesquelles s’inscrivent notamment dans une dimension d’égalité entre les sexes et de lutte contre toutes les formes de discriminations. Mobilisée déjà depuis plusieurs années sur ce sujet, j’ai voulu que notre école aille plus loin pour agir concrètement dans la prévention, l’accompagnement et la lutte contre les VSS. »;

 

Dans l’urgence, quelles possibilités ont les victimes pour se déplacer ? 

Femmes du Gard

Dans le Gard, les femmes victimes de violences conjugales et intrafamiliales peuvent bénéficier de la prise en charge de leur transport en taxi. Ce dispositif a pour objectif de permettre aux femmes victimes de violences au sein du couple et connaissant des difficultés de déplacement, d’accéder aux dispositifs d’aide, d’accompagnement et de protection.

Inscrit dans le plan d’action issu du Grenelle des violences conjugales, la Chambre départementale des Métiers et de l’Artisanat du Gard, en partenariat avec l’ensemble des syndicats de taxis et la Croix-Rouge (plus particulièrement son SIAO pour Service intégré d’accueil et d’orientation, plateforme unique départementale pour l’accès à l’hébergement), se sont mobilisés pour répondre à la demande la Préfecture de prise en charge adaptée du transport des personnes victimes de violences. Une convention a ainsi pu être signée le 4 juillet 2022.

Pour quels déplacements ?

La prise en charge du transport de jour comme de nuit (7j/7, 24h/24) permet un acheminement vers :

  •  un lieu d’hébergement ou de mise à l’abri immédiate ;
  • un commissariat ou une gendarmerie pour déposer plainte ou répondre à une convocation visant à faire valoir ses droits ;
  • des services sociaux ou associatifs pouvant répondre à la situation ;
  • des services de santé/médecine légale à des fins d’expertise médicale.

Ce dispositif de prise en charge des transports prévoit des déplacements sur l’ensemble du département du Gard mais aussi vers les départements limitrophes, si accord préalable du SIAO.

Pour quel public ?

Les personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales, avec ou sans enfant, sans solution de transport, ayant ou non déposé plainte, avec ou sans pièce d’identité.

Comment faire ?

Il faut contacter le 115 qui émettra un bon de transport à destination de l’artisan taxi. Il devra comporter les éléments suivants :

  • le nom, prénom et qualité de la personne qui demande le transport
  • le nom, prénom, date de naissance de toutes les personnes à transporter, avec leur accord, ainsi que l’adresse de prise en charge
  • les besoins spécifiques pour garantir la prise en charge : siège auto enfant, personne à mobilité réduite…

C’est la victime elle-même qui peut faire appel à ce service ou un acteur sur son parcours de prise en charge comme les forces de l’ordre, les acteurs sociaux (Centre communal d’action sociale (CCAS), Centre médico-social (CMS), centres hospitaliers, France travail ou les associations d’aide aux victimes, des associations de quartier, etc.

Le SIAO déclenche alors la prise en charge et coordonne ce dispositif de première urgence.  Guichet unique, il a en charge de :

  • faire du lien entre les victimes et les services de taxis
  • répondre aux besoins des victimes en s’assurant de la réponse apportée par les taxis
    • il pourra analyser le degré de dangerosité de l’auteur des violences lors des prises en charge au domicile et, selon, faire appel aux forces de sécurité intérieure
    • il pourra réorienter vers des interlocuteurs et associations spécialisées
  • garantit la qualité du service apporté grâce à la formation des taxis à l’Egalité entre les femmes et les hommes et au phénomène des violences conjugales et intrafamiliales dispensée par le CIDFF Gard ainsi qu’à l’application des règles contenues dans la Charte départementale en faveur du transport des personnes victimes de violences
  • Procède au paiement du transport

Chiffres  : 108 bons de transport délivrés en 2023  (source 115)

Il reste encore demain

Culture

Le 21 novembre 2023, au nord de Venise, Giulia Cecchetin était assassinée par son ex-compagnon qui n’a pas supporté qu’elle le quitte. Elle avait 22 ans.
Aujourd’hui, en 2024, C‘è ancora domani entre en résonance avec ce féminicide. Immense succès en Italie, il est un véritable manifeste contre les violences faites aux femmes et la culture du patriarcat toujours vivace en Italie.

Synopsis

Mariée à Ivano, Delia, mère de trois enfants, vit à Rome dans la seconde moitié des années 40. La ville est alors partagée entre l’espoir né de la Libération et les difficultés matérielles engendrées par la guerre qui vient à peine de s’achever. Face à son mari autoritaire et violent, Delia ne trouve du réconfort qu’auprès de son amie Marisa. Cette triste routine cessera avec l’arrivée d’une lettre mystérieuse et les concomitantes fiançailles de sa fille Marcella… Ce film, tout en noir et blanc, parcouru de références au néoréalisme italien, avec des incursions dans le domaine de la comédie ou encore du film muet, est une véritable surprise ! Il est plébiscité par la critique italienne et étrangère pour la mise en scène et les prestations des acteurs, ainsi que pour les thèmes abordés liés au féminisme, au patriarcat et à la violence contre les femmes.

de Paola Cortellesi – Italie 2024 1h58mn – avec Paola Cortellesi, Valerio Mastandrea, Romana Maggiora Vergano..